Depuis peu ma fille me regarde droit dans les yeux. Je sais qu’elle me voit, car jusqu’à présent son monde ressemblait plutôt à un kaléidoscope flou de couleurs mélangées aux sons, aux odeurs… et à sa tétine. Mais là il semble qu’elle fait le lien entre ce qu’elle voit et le monde qui l’entoure. Ça l’occupe de longues minutes. Dans son cosy à roulette, j’ai beau l’emmener au parc, c’est moi qu’elle regarde ; à la mer, c’est encore moi ; à la librairie d’où partent les bateaux-bus, toujours moi. Et moi qui me décarcasse à lui faire voir du pays.

De mon côté, pour vérifier si elle me regarde encore, dans toute la ville je ne vois désormais plus qu’elle.

Ces dernières semaines j’ai fait quand même d’autres choses que pousser (et porter) ma fille. Quoique. Une petite sélection.


Harold Lloyd est un peu l’oublié des trois grands cinéastes du muet qui a marqué l’histoire du septième art. Avec Charlie Chaplin et Buster Keaton il a laissé au patrimoine une œuvre considérable (200 films de toutes durées) et digne d’intérêt. Il a même traversé le rideau, pourtant épais, du cinéma parlant mais est tombé en désuétude peu après. Les revenus élevés qu’il demandait pour la retransmission télévisée de ses œuvres n’a pas aidé à le populariser auprès des générations suivantes. Pour autant, grâce à des efforts postérieurs, on se remémore ses frasques et gags en tout genre, de l’athlétique au sentimental.

Grâce au festival international de la musique d’écran, le Fimé, j’ai assisté à la retransmission du muet The Kid Brother (Le Petit frère) accompagné au piano par… mon petit frère. Ça ne s’invente pas. Une très belle séance, salle comble. Sans doute le meilleur moyen de revoir ce film où l’on ne s’ennuie jamais. Lloyd avait recruté 8 gagmen pour s’assurer de nombreux et originaux gags. Même si on croit les voir venir, les gaffes tournent à l’inattendu et surprennent jusqu’au fou-rire.


Couverture du livre Le chercheur d'or de Le Clezio, chez Folio
Couverture du livre Le chercheur d’or de Le Clezio, chez Folio

Côté lecture, je me suis tourné vers la mer avec le roman Le chercheur d’or de JMG Le Clezio. Déniché par hasard à mon kiosque à livre préféré à Toulon, c’est le premier livre de l’auteur que je lis. J’ai adoré et je veux en lire d’autre. Le narrateur Ali, enfant, court avec son copain Denis hors des sentiers d’une Maurice rurale. Il suivra les plans de son père défunt qui disait savoir l’existence d’un trésor. Mais ce qu’il cherche avant tout, c’est la mer. C’est elle qui le guide, l’enivre et l’habite tout entier. La première phrase du roman est :

Du plus loin que je me souvienne j’ai entendu la mer.

La mer, on l’entend tout au long de la lecture et c’est magnifique.


Isaac Albeniz occupe toujours mes doigts. Chaque mesure est une énigme à résoudre. J’ai réalisé que le compositeur espagnol est en fait assez mal documenté. Il faut beaucoup fouiner pour en savoir plus sur sa vie, et aller au-delà du compositeur régional, « illustre représentant de l’école espagnole ». En anglais et en espagnol je trouve des choses intéressantes et qui semble très complètes, par exemple Portrait of a Romantic de Walter Aaron Clark, chez Oxford en 1999 (368 pages tout de même). Je continue mes recherches, je n’ai pas tout exploré.

Un article a cepdenant retenu mon attention : Isaac Albéniz (1860–1909): Spanish musician who died of chronic renal disease par Victor M Garcia-Nieto et Carolina Peralta-Aros, publié dans Journal of Medical Biography en 2013. Autrement dit, un article médical sur l’analyse des raisons de la mort du compositeur. Ce court papier analyse en fait divers écrits et témoignages en relation avec sa santé et ils en concluent à l’urémie.

« It has been a bright idea, I’ve read the book on homeopathy and I have seen that, what is appropriate for diarrhoea is the pulsatilla; I am going to drink it, let’s see what effect makes on me. It has done me much good and I feel much better. »

Albéniz I. Impresiones y diarios de viaje. Madrid: Sociedad Estatal de conmemoraciones culturales, 2009:23– 6

Bref, on est assez loin du portrait d’un romantique, mais il fallait quand même se pencher sur la question. Et entre nous, pour un musicien, mourir d’une u(t)rémie, c’est pas décevant.

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