Je ne voulais pas m’arrêter à Turin et en étudiant la route et la météo j’ai pensé que Milan était à ma portée. Ce n’est pas du tout cuit et en 5h15 de vélo j’ai parcouru 150km (ma plus longue sortie vélo selon ma montre), soient 28,5km/h de moyenne.
Sortir de Turin n’est pas chose facile. En fait, si Turin est une grande ville agréable à vivre (la 8ème d’Italie) c’est aussi un dédale de routes où l’asphalte prend une place gigantesque. Les larges avenues sont flanquées de contrallées et les voix de taxi, bus, tramways se croisent dans des carrefours très compliqués. C’est aussi une myriade de feux rouge que j’ai fini par ignorer (à 6h du matin…).
Il faut bien rouler 20 km avant de se retrouver dans la campagne, dans la large vallée du Pô, que j’ai croisé quelques fois. Cette journée va m’emmener dans la province de Pavie, en Lombardie.
Cette journée est une journée plus sportive que découverte. Le trajet de 150km demande une bonne endurance et une alimentation/boisson régulière au risque de ne pas en voir le bout. Je ne bourrine pas comme la veille, ou le terrain était semblable mais sur une distance beaucoup plus petite (90km).
Il se trouve que je n’ai pas non plus trouvé beaucoup de charme aux villes et villages traversés. La vallée du Pô et belle et large, et les montagnes sont visibles au loin, c’était là l’intérêt du parcours. C’est aussi une région très cultivée et très bien canalisée. Je semble être le premier à passer lorsque je fais déguerpir de magnifiques oiseaux au bec fin et arrondi de leur niches sur ces cours d’irrigation. Par groupe ou isolés ils ponctuent merveilleusement cette section de longues lignes droites autrement jonchées de silos à grain, usine, et même une centrale nucléaire. Certains villages, nommés Località Produttiva sur ma carte, sont fantomatiques en ce dimanche. À faire froid dans le dos.
Je trouve quand même de quoi prendre un agréable petit déjeuner dans un des villages traversés : Palazzolo Vercelese. Une vie locale très animée s’y retrouve. Épuisé j’engouffre mes deux croissants tarifaires.
Les malheurs de Sophie
À ma pause des 100km je repère cette fois un centre commercial. Comme j’ai loupé l’embranchement je me permets un petit raccourci dans l’herbe. Erreur fatale ! Je crève immediatement mes deux roues… en roulant sur des chardons ou ce qui semble être des épines de roses. Pas si fatale car j’ai deux chambres d’avance. Je suis désormais à vide. Dans ma malchance, j’ai la chance de trouver un rayon vélo dans l’espèce de Carrefour. J’en profite pour finir de gonfler mes nouvelles chambre avec la pompe à pied (car la petite pompe de survie que j’emporte avec moi a ses limites). Mais dans la chance de ma malchance, j’ai la malchance (faut suivre) de constater que les seules chambres qu’ils n’ont plus en stock sont justement mon format. Je prends un pack de rustine pour le geste, mais en gros je n’ai pas de cartouche d’avance. Il me reste 50km à parcourir.
Cette malchance chanceuse m’aura fait prendre une pause d’une heure, sur laquelle j’ai aussi réservé mon auberge ce soir, et je dois dire que c’est sur la dernière section de l’étape que j’étais le plus en forme. Frais comme un gardone.
En plus, sur la fin du parcours, je rattrape (difficilement) un cycliste du coin. Rien de mieux pour passer le temps. Policier de Venise travaillant sur Milan, il sort deux ou trois fois par semaine écumer le plat pays. Il m’escorte de fait jusqu’à la ville et me fait oublier tous mes tracas sur lesquels je peste en fin de parcours : mal aux fesses, au dos, aux jambes, trop chaud, trop de trous sur la route, une montée (pour passer un pont…). Bref, le vélo, quoi.
On ne peut pas dire que les italiens sont fiers de vous faire entrer dans leur ville. Un vulgaire panneau Milano, caché derrière une pub, apparaît de nulle part dans une zone limite en friche. Malgré cette banalité d’une entrée de grande ville, c’est ma libération. J’ai roulé pour ça aujourd’hui, et les 4 jours précédents. Pietro s’en fiche pas mal mais il me felicitera quand on se séparera quelques kilomètres plus loin. Je lèverai bien les bras pour célébrer mais la section pavée commence seulement.
L’entrée en ville se fait le long du canal Navigli Grande, qui donne son nom au quartier (Navigli) où je réside. Un quartier vivant, plein de restos et d’animation. Moi, je suis mort et je ne suis pas en état de m’animer. Je me paye une énorme escalope milanaise qui ne valait pas son prix et fini les derniers mètres à pied pour m’éviter l’effort de remonter sur le vélo (mes pauvres fesses…).
Je suis venu à Milan pour voir la Cathédrale, au moins. Je vais me forcer car je finis cet article à 19h… j’ai eu du mal à sécher mes vêtements (à coup de séchoir bloqué au sandow) et je serai bien resté dans mon quartier.
Malgré mes efforts pour tenir ce blog, j’ai l’impression de ne vous avoir rien dit. Rien dit de ce que c’est réellement de traverser des cols ou des zones industrielles à 500km de chez soi, de pédaler sans interruption des heures entières, de rouler avec le soleil et les montagnes comme bonne étoile ou de passer le plus clair de son temps tout seul et en extérieur. Avec un vélo comme seul compagnon et Grazzie Mille comme seul moyen d’expression, tout est un peu une aventure. Il faut la vivre.
Merci de m’avoir suivi et pour tout vos encouragements. Ça m’a fait un bien fou. Arriverderci!
bravo ! c’était chouette de te lire et ça donne envie !
tu rentres comment à Toulon ?
Bravo mickael pour cet exploit
Merci pour le partage, c’est chouette ! Ça donne envie de partir en mode ultra-léger, en réservant au jour-le-jour 🙂 Bravo pour le périple !