Lors de mon séjour de six mois en Slovénie, j’ai eu l’occasion de co-encadrer un atelier d’informatique à des enfants de 8 à 12 ans à l’École française de Ljubljana (EFL). Petit retour d’expérience.

Apprendre à programmer peut sembler être une occupation de spécialiste ou du moins d’initié. Cependant j’ai vu de loin fleurir ces dernières années tout un tas de projets ludiques pour apprendre la programmation à tout âge. Quand la directrice m’a suggérer de proposer un atelier Scratch, je n’ai pas été surpris car c’est de loin le plus connu et le plus emblématique de ces projets. D’ailleurs, il rentre au programme scolaire français dès la rentrée prochaine.

Je n’ai pas beaucoup d’expérience dans l’enseignement mais j’ai tout de suite voulu relever le défi. Il faut dire aussi que c’est moi qui l’ai cherché. En effet, alors que je fréquentais beaucoup la médiathèque de l’Institut Français de Ljubljana et de ses activités en français, j’ai rencontré une enseignante de l’école française, qui m’a mise en relation avec la directrice.

Scratch est un environnement de programmation ludique qui se passe en ligne ou localement via un logiciel (idéal pour les écoles non ou mal connectées). Au lieu de taper du code, comme le font les programmeurs professionnels, on assemble des blocs de couleur pour exécuter des actions, les répéter, les conditionner avec des actions de l’utilisateur… en bref ce que fait en général un programme informatique. Une des grandes forces de Scratch est de programmer un environnement graphique (un jeu), qui rend la moindre création visible immédiatement.

J’ai d’abord dû prendre en main Scratch, créé mes premières applications et lu les ressources nombreuses mises à disposition. La documentation Scratch est organisée en deux parties : les enseignants et les programmeurs. Et des idées de premiers ateliers avec suggestion d’accompagnement sont fournies. Du pain béni ! Inutile de dire que je m’en suis inspiré.

J’avais trois séances à co-encadrer. J’ai tenté de leur faire programmer un mini jeu sur ces trois séances.

Dans la salle de cours

Faut-il le préciser, j’étais stressé. Heureusement j’ai pu inspecter les lieux avant la première séance, notamment la présence d’un vidéoprojecteur et la qualité d’Internet. La salle est bien agencée et presque tous les postes fonctionnent, j’étais plutôt rassuré.

Les élèves rentrent dans la salle comme une vague d’énergie, infiniment communicative ! Une fois chacun à son poste (ou plutôt en binôme) la session commence.

J’ai organisé mes séances comme suit :

  1. Rappels des concepts appris la fois précédente (sauf la première fois)
  2. Présentation de nouveaux concepts et ce que j’attends d’eux durant la séance
  3. Programmation ! (90 % de la séance) avec l’enseignante et moi-même qui assistons individuellement
  4. Lors de la dernière séance, nous avons invité certains à présenter leur projet (et j’ai aussi présenté les miens pour qu’ils se projettent un peu)

Il m’a paru très important de donner les instructions principales en début de séance, et non pas pendant, car il est très difficile de récupérer leur attention une fois qu’ils sont devant un écran…

Quelques projets de classe. « niam niam » consiste à faire manger les friandises par le lapin qu’on devine à gauche. Thème similaire à « Donut » avec une navigation sur 2 axes. « unicorn » a consisté à faire tourner dans l’espace ces objets sur un fond musical. Assez pauvre en programmation et interaction (c’est surtout du paramétrage je dirais), il a eu néanmoins un franc succès ! « Basket » consiste à mettre des points en lançant le ballon. Si l’idée est facile à comprendre, elle est difficile à programmer et j’ai dû intervenir sur ce projet (et me creuser moi-même les méninges…)

Quelques observations

Voir des enfants apprendre la programmation est merveilleux. Ceux qui savent programmer savent que c’est une discipline par nature ludique, intuitive et logique. Elle est donc très appropriée pour une exposition auprès des enfants.

J’ai remarqué d’abord que certains enfants restent obnubilés par le graphisme, les couleurs, les personnages plutôt que de savoir ce qu’ils doivent en faire (malgré mes instructions). Il faut parfois les recadrer pour leur rappeler de les faire bouger et réagir (ce que permet bien l’informatique) et non pas se cantonner au « coloriage numérique ».

La première séance était plus libre, mais les deux autres avaient l’objectif clair de faire un jeu. L’idée peut les surprendre : pour eux les Lego par exemple sont bien un jeu de construction, mais l’informatique est un jeu que l’on consomme plutôt que l’on façonne. Bien entendu ils se sont très bien accommodé de l’idée, rien n’est impossible à cet âge. Je sais bien qu’ils connaissent très bien les jeux vidéos par ailleurs… et c’est pourquoi j’aime leur apprendre que pour jouer il faut bien que quelqu’un fabrique le jeu, et de les associer à cette phase de création. Ils auront peut-être une vision plus complète du jeu vidéo ensuite, je l’espère.

Comme dans tous les binômes, il y en a un qui garde la souris, et donc le contrôle, toute la séance durant ! Avec la direction on a rapidement instauré un changement de rôle au milieu de la séance pour que les deux élèves du binôme pratiquent bien.

Conclusion

J’ai aimé préparer les séances et observer leurs progrès. Ils attendaient avec impatience la séance suivante (« le jour où Mickaël vient ») ce qui bien sûr me ravi (plus pour l’intérêt qu’ils portent au projet que mon égo !).

La fourchette d’âge était difficile, et je pense que ma proposition était un peu ambitieuse. Certains devaient véritablement attendre qu’on leur montre comment faire, voire le faire à leur place. Le temps m’a manqué, et je voulais néanmoins aboutir à un mini-jeu plutôt qu’apprendre uniquement les fonctionnalités.

J’espère que cette initiation leur a laissé un bon souvenir, et que s’ils pratiquent l’an prochain ils se rappelleront de quelques bases. Et de moi (là, c’est pour mon égo). Je remercie chaleureusement la directrice qui m’a permis de faire ça en toute simplicité et avec évidence, tout comme j’aime. Peut-être aurais-je l’occasion de reproduire l’expérience, qui sait ?

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3 commentaires

  1. Je dirais 8 ans, c’est l’âge conseillé par Scratch (de 8 à 16 ans). En dessous de 8 ans il existe Scratch Jr. que je ne connais pas. Ensuite, en fonction de l’âge on peut faire des choses plus ou moins complexes : les variables, les conditions, …

  2. […] Certains de ces étudiants sont d’ailleurs « les miens », depuis que j’ai décroché un modeste cours d’informatique à de jeunes bacheliers. J’ai préparé minutieusement mon cours et sujet de TD afin de les occuper quatre heures. Si la réalité du terrain est toujours un peu éloignée du fantasme de la « passation de connaissance », il me faudra plus qu’une séance pour me démotiver. Ce n’est pas la première fois que j’enseigne, mais la fois précédente le contexte était très différent car il s’agissait d’enfants. Mais d’informatique quand même, en Slovénie. Lire ici : Enseigner la programmation à des enfants. […]

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