Evgeny Kissin jouait mardi dernier au théâtre des champs élysées. J’y étais. J’ai aimé.

Au programme :

Beethoven Sonate n° 21 « Waldstein »
Prokofiev Sonate n° 4
Chopin
Nocturnes op. 9 n° 1, op. 9 n° 3, op. 48 n° 1
Mazurkas op. 6 n° 1, op. 6 n° 2, op. 6 n° 3, op. 7 n° 2, op. 7 n° 3, op. 41 n° 1
Liszt Marche de Rakoczy

Un programme qui lui sied bien donc ! Ce « spécialiste de Chopin » a pourtant donné une première partie beaucoup plus intéressante. La sonate Waldstein de Beethoven fait partie des sonates les plus connues, et donc jouées, des œuvres du compositeur. Elle a des proportions très vastes, en trois mouvements, et se termine par un rondo brillant très ingénieux tant sur le déroulement de la trame mélodique que sur les moyens pianistiques mis en oeuvre.

Lorsqu’il s’agit de Kissin, il n’est nullement nécessaire de parler de technique. Mais plutôt ce qu’il en fait. Il est indéniable qu’il use beaucoup de contrastes pour structurer les diverses sections. Il est difficile de ne pas tomber dans une régularité ennuyeuse dans un tel morceau, en particulier lorsque le motif principal est un accord répété une vingtaine de fois. Les accords structurants sont plaqués franchements, ce qui est absolument parfait ici. Le lyrisme est indéniablement présent. Il n’est pas possible de se perdre dans une telle interprétation, avec une telle conscience musicale.

Ces qualités sont exacerbées dans un Prokofiev envoûtant de la première à la dernière note. Le deuxième mouvement est mené d’une main de maître et les thèmes, très clairs, s’enchevêtrent avec une précision et – une fois de plus – un lyrisme admirable. Ce n’est pas ma sonate préférée, mais l’intensité qui s’en est dégagée créé un lien fort entre le pianiste et l’auditoire. Il n’est pas possible de décrocher.

La deuxième partie fut moins à mon goût. Je ne comprends toujours pas l’intérêt de se faire succéder ces pièces courtes et languissantes de Chopin pour en faire une partie toute entière. Ces pièces s’enchaînent assez mal. Malgré leurs similitudes, les atmosphères diffèrent beaucoup, et le choix de les enchaîner presque attacca est une mauvaise option, bien que peut-être la seule face à un public aussi dissipé (et tousseur) que celui des champs. L’op. 9 n° 3 et l’op. 41 n° 1 furent néanmoins remarquables, et pour moi bien au-dessus des autres, sans doute justement pour cette force du contraste qui les caractérisent.

Quant à l’époustouflante difficulté du Liszt, elle n’a pas empêché Kissin d’en extraire l’humour qui anime cette pièce.

Kissin maîtrise le lyrisme au piano et transmet la force intérieure de la musique. Il est le meilleure lorsque les œuvres savent les conjuguer.

Photo à la une : Robert Torres

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